Kaërys naquit quelques temps avant le solstice d'été, dans le paisible village d'Eben. Ce lieu, bien qu'animé par la routine de ses habitants, était si calme qu'on l'aurait cru suspendu hors du temps. Si loin des grands empires et des guerres, le village prospérait seul, au milieu de nul part. Pourtant, croire cet endroit inoffensif aurait été une grave erreur. Dans ce village, les plus vaillants combattants de tout le royaume naissaient et mourraient sans jamais connaître la facilité du combat en rang. Orpheline depuis son plus jeune âge, Kaërys vint au monde avec un étrange pouvoir, qui lui permettait de lire l'esprit et de communiquer avec les espèces animales et végétales. Dangereux à maîtriser, elle aurait du quitter le village pour aller rejoindre les mages et apprendre à contrôler ce pouvoir. Pourtant, dès qu'elle fut en âge de choisir, elle prit les armes. Se battre lui apportait un soulagement que rien d'autre ne lui donnait. Une lance à la main, elle pouvait oublier la cage qui tentait de lui broyer la tête. Elle s'entraîna donc nuit et jour et devint une guerrière à la hauteur de ceux de son peuple. Pourtant, son destin était déjà scellé. Dès sa naissance, l'Oracle avait eu une vision, une prédiction : "L'enfant né de l'esprit mourra lors du dix-septième solstice." Kaë, de son surnom, avait d'abord refusé de croire qu'elle ne connaîtrait jamais l'âge adulte. Puis finalement, au bout de longues années de souffrance, elle avait accepté la mort, où son pouvoir retournerait à sa place, chez les esprits. Alors que le soleil descendait dans le ciel, elle accueillit la mort avec soulagement. Une simple mortelle, humaine et jamais formée, n'aurait pu endurer plus longtemps le poids démesuré de cette écrasante magie. Seuls les mages pouvaient prétendre à maîtriser ces choses. Alors, dans un dernier soupir, elle laissa ce pouvoir dangereux et si peu puissant l'envelopper et la consumer entièrement.

Lorsque, par un curieux miracle, Kaërys se réveilla, elle commença directement à tâter le sol près d'elle. Était-ce une blague ? Elle se releva lentement et examina le couloir vide d'ornement. Comment avait-elle atterri là ? Un angoisse glaciale s'insinua en elle. Elle avait peur. Et pour cause ! Elle était supposée être morte ! Pourtant, aussi étrange que cela puisse être, elle se sentait vivante. Et comble du bonheur, ou du malheur, ce pouvoir qui la faisait tant souffrir semblait s'être calmé, tapis au fond d'elle-même. Comme si tout à coup, il était sous son contrôle. Dans un élan d'espoir, elle se tourna. Sa joie retomba bien vite. Après toutes ces bonnes nouvelles, elle avait cru pendant un instant que tout serait parfait. Mais non. Sur le sol, aucune arme ne gisait dans l'attente d'être saisie. Pourtant, elle avait bien demandé à ce que ses armes soient brûlées avec elle, lors du bûcher funéraire ! Pourquoi lui avait-on refusé ce dernier honneur ? N'avait-elle pas été une bonne guerrière tout au long de sa vie ? N'avait-elle pas mis le pain sur la table de dizaine de famille en chassant pour son village ? Des larmes lui montèrent aux yeux et elle les essuya d'un revers rageur de la main. L'incompréhension, mêlé au désespoir, lui faisait perdre ses moyens. Où diable était-elle !? Sans ses armes, comment pourrait-elle affronter l'inconnu ? Et cette tenue ! Quel idiot l'avait donc affublé d'une robe !? Perdue, Kaërys commença pourtant à avancer vers la lumière. Le néant derrière elle lui semblait tout sauf accueillant. Elle voulait trouver quelqu'un et lui arracher, de gré ou de force, des réponses. Formée pour être une guerrière, elle avait aussi appris comment faire parler ses ennemis. La torture était un art qu'elle se plaisait à maîtriser. Soudain, un passage sembla s'ouvrir sur sa droite. Son attention détournée de la lumière, elle s'y engagea. Qu'avait-elle à perdre de toute façon ? Elle était déjà morte... Devant elle, le noir céda place la verdure typique des plaines entourant son village. Une vague de soulagement déferla en elle et elle osa courir vers l'herbe. Seulement, avant même qu'elle ne puisse toucher l'étendue herbeuse, tout sombra dans un néant affreusement froid. Un vent glacial s'insinua sournoisement sous la robe de Kaërys et elle hurla. Ce froid là n'était pas du à l'hiver. Il ne picotait pas sa peau et ne gelait pas ses doigts. Il s'attaquait directement à son coeur. Ce froid-là, comprit-elle, était dû à la solitude et au mal du pays. Elle ne savait pas où elle était, mais elle voulait rentrer chez elle ! La guerrière pleura. Ses larmes coulèrent le long de ses joues et s'écrasèrent contre le sol noir. Elle voulut hurler pour appeler à l'aide. Le son se bloqua dans sa gorge. Elle regarda autour d'elle. La lumière avait disparu. Il n'y avait que du vide. Rien. Elle secoua alors la tête. Ressaisis-toi ! Tu n'es pas n'importe quoi ! Tu es une guerrière, et une guerrière digne de ce nom ne se laisse pas paralyser par ses émotions ! Ouvre ton esprit et cherche la sortie. Pense à la solution, pas au problème ! Ce furent ses pensées. Écrasant encore une fois les perles salées qui creusaient des sillons sur ses joues, elle se remit en marche. Quel était donc cet endroit, qui la confrontait à ses pires angoisses ? La solitude, l'isolement, voilà deux choses qui l'effrayaient au plus haut point. Bien sûr, si elle l'avait dit à quelqu'un, il ne l'aurait pas cru. En apparence, elle était toujours seule. Pourtant, grâce à son pouvoir, un simple arbuste pouvait lui servir de compagnie. Elle n'avait pas besoin de la présence intelligente d'un humain. L'esprit simple et heureux de la nature lui suffisait. Soudain, une lueur bleue apparut devant elle et Kaërys se figea. Si elle pouvait affronter le froid glacial du néant, se confronter directement à son pouvoir lui était impossible. Même s'il était invisible aux yeux de tous, la guerrière savait que sa magie était composée d'une étrange fumée bleue reliée à ses cheveux par des fils. Comme un prolongement de sa chevelure, elle sentait son pouvoir se répandre dans l'air avant de toucher sa cible. Sans même considérer les option qui s'offraient à elle, Kaë prit la fuite. Peu importe où elle allait, tant qu'elle s'éloignait de son pouvoir. Finalement, ce fut un chemin de pierres rondes, jaillies de nulle part, qui la conduisit vers la lumière. Au début, elle fut aveuglée, puis elle écarquilla les yeux. Un portail se trouvait juste devant elle. Par les Douzes, que fichait-elle devant un portail !? Pourtant, malgré son incompréhension, une force tapie en elle la poussa à avancer. Peu importe où ce truc menait, les réponses étaient de l'autre côté.

Kaërys a des cheveux bruns plutôt long généralement lâchés dans son dos ou coiffés en queue de cheval. Ses yeux foncés changent de couleur en fonction de ce qu'elle porte. Ils restent pourtant assez foncés, ce qui assombrit son visage et lui donne un air renfermé. Toujours habillée sobrement, elle refuse de porter quelques robes que ce soit et enfile sa tenue de cuir dès qu'elle le peut. Peu importe où elle se trouve, elle est toujours armée et refuse qu'on la sépare de ses lames. Elle les lâche seulement lorsqu'elle les sait en sécurité.

Kaërys est personne renfermée et solitaire qu'il est dur d'approcher. Elle fait difficilement confiance aux autres, mais pourtant, quand on la connaît, elle devient une personne souriante, de bonne humeur et particulièrement empathique. Elle peut paraître très peureuse, mais son courage réside dans le fait que peu importe combien elle a peur, elle continuera d'avancer.